30 ans de Cliniclowns : des débuts timides jusqu’au cœur battant

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Depuis 30 ans, les Cliniclowns font revenir le sourire sur les visages des enfants malades en Belgique. Avec succès ! Aujourd’hui, ils sont le cœur battant de 35 hôpitaux et établissements de soins dans les deux parties du pays. Leur histoire, c’est celle d’un sourire, d’une larme et… d’un nez rouge.

New York, New York

L’instigateur des Cliniclowns est Michael Christensen. Artiste de rue et clown du célèbre cirque Big Apple dans les années 1980, il a pu constater l’importance de la distraction et de l’amusement pour les enfants en situation difficile. Lorsque son frère, lui-même médecin, a été hospitalisé pour un cancer, il lui a régulièrement rendu visite pour lui remonter le moral. En passant dans les couloirs de la pédiatrie, il a remarqué que les enfants attendaient eux aussi avec impatience son apparition. À la mort de son frère, Christensen a hérité de sa trousse de médecin. C’est ainsi qu’est né son personnage de clown : Dr Stubs.

À la demande des médecins, Christensen s’est produit lors d’une journée portes ouvertes au Babies & Children’s Hospital du Columbia Presbyterian Medical Centre. Ce fut un grand succès et le début des visites organisées de clowns aux enfants dans les hôpitaux. En 1986, il a fondé la Big Apple Clown Care Unit à New York.

Michael Christensen
Les Cliniclowns considèrent l’inspirateur Michael Christensen comme leur “parrain”.
Il y a quelques années, il est même venu en Belgique nous donner des ateliers inspirants.

Sur le sol belge

L’histoire belge commence en 1993 avec l’initiateur anversois Swa Vetters, qui est toujours membre de l’organe directeur à ce jour. C’est un documentaire sur le BRT de l’époque qui l’a inspiré. « Ma première réaction a été : wow, je veux ça ici aussi. Quelque chose de si beau. L’approche des clowns et leur impact sur les enfants malades étaient révolutionnaires. Personne en Belgique ne connaissait l’initiative, mais après six mois et la visite de 20 Lions clubs, j’avais réuni les 1,2 million de francs belges nécessaires, et le 1er février 1994, on a démarré. »

Clown de la première heure

Ana Verbelen a été l’une des premières « clowns de l’hôpital d’Anvers ». « Comme mon collègue Jan, je venais d’obtenir mon diplôme de clown à l’école du cirque de Bruxelles », raconte la clown Erzulia. Titulaire d’un diplôme d’éducatrice-superviseur, elle était le clown idéal pour briser la glace. « Surtout dans les premiers temps, il s’agissait à chaque fois d’ouvrir une nouvelle porte, au sens propre comme au sens figuré. Nous ne savions jamais comment un enfant ou des parents allaient réagir face à ces deux clowns inconnus, dans leurs costumes faits maison et avec des valises pleines de tours de magie, d’instruments de musique et d’accessoires. Plus encore qu’aujourd’hui, il s’agissait d’improviser. Mais combien de fois avons-nous retourné toute la pièce, ou nous sommes-nous allongés à trois sur un lit de dialyse en riant ? »

Ana Verbelen & Swa Vetters

Une courte période d’essai

Le démarrage s’est accompagné d’un certain scepticisme de la part du personnel médical de l’hôpital. Nous avons donc commencé par une période d’essai d’un an. Mais avant même la fin de cette année, le pédiatre en chef de l’un des hôpitaux a fait savoir qu’il était totalement conquis par l’idée des Cliniclowns. Les pédiatres ont clairement remarqué que les visites de nos clowns professionnels faisaient du bien à leurs patients. Le coup d’envoi a été donné pour une expansion qui a rapidement dépassé les frontières de la province d’Anvers. En 2001, l’asbl prend officiellement le nom de Cliniclowns Belgique.

Tout pour l’enfant

Au cours de ces 30 années, les clowns ont connu une véritable évolution. Leur tâche est devenue bien plus que de la distraction et de l’amusement. « Avant, nous faisions rire les gens, aujourd’hui nous leur donnons surtout de l’attention », explique Geert Pardon, ancien clown et membre de l’organe directeur. « Vingt ans après être entré dans le service d’oncologie de l’UZ Gasthuisberg avec un nez rouge, l’accent mis sur le contact personnel, direct et l’interaction avec l’enfant est encore plus important. L’astuce consiste à trouver ce dont l’enfant a besoin à ce moment-là, pour apporter une certaine “légèreté” à son séjour à l’hôpital. Cela n’arrivait jamais auparavant, mais une fillette de 6 ans en pyjama de princesse sera traitée comme une princesse, et on improvisera une histoire romantique avec un château. »

Des bêtises qui touchent tout le monde

Au fil des ans, l’attention portée à l’entourage de l’enfant s’est également accrue. « Les parents, les infirmières, les médecins, l’équipe de nettoyage… tout le monde est impliqué », explique Geert. « Car ils ont tous le même objectif : améliorer le sort des enfants. Lorsque nous quittons la pièce, l’atmosphère est souvent complètement différente. Chacun a pu oublier ses problèmes pendant 15 minutes. C’est pourquoi nous jouons aussi pour les bébés : après tout, il se peut que la maman ne se sente pas bien après son séjour à l’hôpital. Nous prenons également notre temps pour le personnel, afin de lui offrir un sourire et un moment de détente, entre tous les soucis du service des enfants. »

C’est ainsi que ce qui a commencé avec deux clowns en pédiatrie à l’hôpital universitaire d’Anvers s’est transformé au fil des ans en une organisation professionnelle comptant 35 clowns en Flandre et en Wallonie. Aujourd’hui, par extension, les Cliniclowns jouent également dans les maisons de repos et de soins, et même à domicile via l’application Clinicam.

Prêts pour les 30 prochaines années

Parce qu’un rôle de Cliniclown exige un grand engagement personnel qui peut parfois être émotionnellement très lourd, l’organisation travaille exclusivement avec des clowns professionnels. « Au cours de ce quart de siècle, la professionnalisation s’est énormément développée », explique Geert. « Nous investissons constamment dans la formation, les ateliers pratiques et la supervision. » Ce qui n’a jamais changé, c’est l’apparence des clowns. Pour ne pas effrayer les enfants, les clowns de la clinique ont toujours choisi de ne pas se rendre à l’hôpital vêtus d’un costume brillant, d’une perruque, d’un grand chapeau et de longues chaussures. Mais le nez rouge, lui, restera toujours.

Le fonctionnement et l’organisation de l’asbl restent les mêmes après 30 ans. « Cliniclowns Belgium est toujours une asbl qui ne reçoit aucun subside et qui dépend entièrement des dons », explique Renée Marien, actuelle présidente de l’asbl. « Tous les revenus vont directement à l’asbl, ce qui nous permet de rémunérer nos clowns – tous professionnels – pour le formidable travail qu’ils accomplissent. De cette manière, nous espérons ajouter au moins 30 années supplémentaires ! »

Cliniclowns Belgique en chiffres :
  • 35 clowns
  • 4 employés administratifs salariés
  • 5 membres du conseil d’administration, non rémunérés
  • > 22.000 enfants visités par an
  • collaboration structurelle avec 35 hôpitaux et établissements de soins